Tribune

La guerre qui a ramené Israël vers son Esprit

Oui, nous vivons des instants historiques. Après les beepers, Nassarala, Sinwar, et surtout après le miracle iranien de juin dernier, la terminologie peut paraitre galvaudée. Mais elle ne l'est pas.

5 minutes
17 octobre 2025

ParDaniel Haïk

La guerre qui a ramené Israël vers son Esprit
Photo: Hadas Parush/Flash90

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Car comment expliquer autrement que dans une dimension biblique et métaphysique, une guerre qui a débuté à Sim'hat Torah et qui se termine deux ans plus tard par le retour de tous les otages à la veille de cette même fête où nous revendiquons la centralité de la Torah? Et plus précisément à Hochana Rabba, une journée qui s'intitule "Le grand sauvetage"!

Nous vivons, ces derniers jours, des instants qui suscitent en nous, de multiples sentiments souvent complémentaires, parfois contradictoires mais qui, toujours, se bousculent dans un esprit préparé à tout, mais pas vraiment à l'incroyable!

Et ce lundi, l'incroyable c'était de voir ces 20 otages, amaigris et épuisés rentrer au pays après deux ans de captivité, pour y recevoir, virtuellement, ce que dans la tradition juive on appelle la "Pitka Tova", l'ultime "bon" d'inscription dans le Livre de la Vie pour cette nouvelle année 5786.

-Alors avant tout, c'est bien sur un immense sentiment de soulagement de les savoir à nouveau parmi nous. Tous. Et derrière ce soulagement un aveu: c'est vrai, nous avons douté: nous pensions que jamais le Hamas ne les libèreraient tous. Et encore moins qu'il accepterait de le faire comme première étape d'un accord.

-Alors, bien sur, il nous faut remercier le président Trump pour sa détermination, pour sa capacité à bousculer les conventions, et à créer un modèle inédit de diplomatie efficace. Mais , il ne faut pas oublier Benyamin Netanyahou qui a su se mettre au diapason du président américain sans renoncer aux intérêts d'Israël. Et il faut mentionner, le ministre israélien Ron Dermer qui a su avec Witkof et Kushner concocter un "plan Trump" adopté par le monde entier!

- Et puis, un sentiment de honte, malheureusement, après avoir entendu samedi soir, la foule huer Benyamin Netanyahou lorsque Steeve Witkoff l'a remercié pour son aide précieuse dans la conclusion de l'accord. En agissant ainsi, ces manifestants ont prouvé que leur haine de Netanyaou est plus profonde que leur mobilisation en faveur des otages. Ils ont confirmé que le dossier sacré des otages avait été depuis longtemps profané par la secte des "Kaplanistes antis-Bibi". Enfin dans leur haine aveugle, ils n'ont pas compris que leur comportement faisait, à nouveau, glisser des milliers de voix vers ce Netanyaou qu'ils détestent.

-Et pourtant derrière ce mépris, un espoir: que ces deux ans de guerre aient fait prendre conscience à l'immense majorité des Israéliens que sans cohésion nationale, sans respect mutuel nous sommes condamnés à revivre perpétuellement d'autres "7 octobre".

-Et puis en assistant à ces scènes de retrouvailles des otages avec leurs familles, jaillit un immense sentiment de reconnaissance envers les 915 soldats israéliens qui sont tombés au combat, envers les milliers d'autres blessés, et les dizaines de milliers qui ont combattu le Mal Absolu dans les ruelles et les tunnels de Gaza. Pendant deux ans les médias israéliens nous ont fait partager l'histoire des 251 otages kidnappés. Chaque Israélien sait qui est Omri Miran, Ron Braslavslki, Eytan Mor et Eviatar David. Désormais, alors qu'ils sont revenus, il est de notre devoir d'ouvrir le Grand Livre de la Bravoure, afin de découvrir qui sont ces héros, morts pour la Patrie et pour la libération des otages et qui nous ont appelé à préserver l'unité de la Nation. C'est le moindre hommage que nous puissions leur rendre!

- Et puis, une certitude: nos ennemis n'ont pas baissé les bras. Aucune des 21 clauses du plan Trump n'oblige le Hamas à renoncer à son projet de destruction de l'Etat d'Israël. Et tant qu'il en sera ainsi, la guerre ne sera pas terminée. La vigilance devra rester de mise. Le Hamas devra être désarmé et renoncer à tout pouvoir dans Gaza. C'est la condition que posent les membres des kibbutzim meurtris du Pourtour, pour poursuivre leur reconstruction.

Mais aussi, on peut ressentir un sentiment d'inquiétude face à l'avenir incertain, en perspective de négociations qui pourraient malgré tout aboutir au maintien du Hamas à Gaza, voire même à la création d'un état palestinien qui serait imposé à Israël.

Enfin une réflexion qui a muri: depuis deux ans, les Israéliens cherchent un nom à cette guerre qui a commencé à Sim'hat Tora. Le fait qu'elle se termine deux ans plus tard, à l'entrée de cette même fête ne peut être le fruit du hasard: nous l'avons martelé durant ces 735 jours, cette guerre a marqué, pour de nombreux israéliens, un retour prononcé vers une identité juive décomplexée. Or dans la liturgie de cette fête, figure une prière symbolique: celle pour la pluie."Machiv Haroua'h Oumorid Hagueshem. Qu'Il fasse souffler le vent et tomber la pluie," demandent les fidèles dans les synagogues. En hébreu "Roua'h c'est le vent mais c'est aussi l'Esprit. "Machiv Haroua'h", peut aussi signifier, qu'Il ramène l'esprit. Voilà un nom tout désigné pour cette guerre de deux ans. La guerre qui a ramené les Israéliens vers l'Esprit d'Israël! Si simple, si évident et si vrai!

Auteur: Daniel Haïk
Chronique publiée dans ActuJ numéro 1799