Vers 11 heures, dix chasseurs F-15 s'envolent pour une mission longue de 3 000 kilomètres et frappent en deux vagues le complexe de l’OLP et des habitations voisines. En deux minutes, tout est réduit en cendres.
Bilan : 68 morts – 50 Palestiniens et 18 Tunisiens – et plus d’une centaine de blessés. Les images diffusées à la télévision tunisienne, montrant des bulldozers déblayant des monceaux de gravats, et les dégâts sont estimés à 6 millions de dollars.
Trois ans plus tôt, après l’invasion israélienne du Liban, l’OLP avait trouvé refuge en Tunisie, avec la bénédiction américaine. Officiellement, le raid ordonné par le Premier ministre de l'époque Shimon Peres.répondait à l’assassinat, quelques semaines plus tôt, de trois civils israéliens sur un yacht à Larnaca à Chypre, revendiqué par la Force 17, l’unité d’élite de l’OLP. Le ministre israélien de la Défense, Yitzhak Rabin, voulait démontrer que l’OLP n’était « à l’abri nulle part ».
Le chef de l’OLP, Yasser Arafat, était visé. Selon les services du Mossad, il devait se trouver ce matin-là à une réunion dans le complexe de Hammam Chott. Mais, arrivé la veille du Maroc, Arafat avait changé ses plans pour assister aux funérailles d’un ancien ministre tunisien de la Défense. Un imprévu qui lui a sauvé la vie. Des proches affirmeront plus tard qu’il avait été averti.
L’opération provoque immédiatement une crise diplomatique majeure. Pour Habib Bourguiba, président tunisien, la souveraineté nationale avait été bafouée. La colère est aussi dirigée contre les États-Unis, accusés d’avoir fermé les yeux, voire facilité l’opération en permettant à Israël d’utiliser une base américaine en Sicile pour son ravitaillement.
La Tunisie porte affaire devant l’ONU. Le 2 octobre, le Conseil de sécurité adopte la résolution 573 par 14 voix contre zéro – les États-Unis s'étaient abstenus sans user de leur veto. Pour la première fois, Israël est formellement condamné par l’ONU pour avoir attaqué le territoire tunisien. Le texte reconnaît même un droit à réparation.
Sur le papier, la Tunisie remporte une victoire diplomatique. Dans les faits, aucun dédommagement ne sera versé. Israël, sermonné mais non sanctionné, n’en fut guère ébranlé. Trois ans plus tard, en avril 1988, un commando de la Sayeret Matkal infiltré à Sidi Bou Saïd assassine Khalil al-Wazir, alias Abou Jihad, numéro deux de l’OLP et bras droit d’Arafat.