Tribune

La charge de Yaïr Lapid contre l'ONU

Le chef de l'opposition israélienne dénonce la mainmise des États non démocratiques sur l'ONU et plaide pour sa refondation.

5 minutes
11 septembre 2025

ParGuitel Benishay

La charge de Yaïr Lapid contre l'ONU
Photo by Avshalom Sassoni/Flash90

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Dans une tribune, en date du 10 septembre 2025, publiée sur le site de Fox News, le chef de l'opposition israélienne se lance dans une critique sévère de l'ONU et appelle à sa refondation totale.

''En 2021, durant mon mandat de ministre des Affaires étrangères d'Israël, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté une série de résolutions hostiles à Israël. L'année suivante, devenu Premier ministre, j'assistai à l'adoption d'une nouvelle salve de résolutions du même acabit'', commence Lapid.

Et il ajoute: ''Ces votes ne suscitèrent aucune émotion particulière. Nul collaborateur ne fit irruption dans mon bureau, brandissant des documents avec affolement. Nous ne nous sommes pas rassemblés devant nos écrans, les mains moites, dans l'attente fébrile du scrutin. L'ambassadeur d'Israël auprès des Nations Unies ne m'appela pas, la voix brisée, pour confesser son sentiment d'échec. Que l'ONU se réunisse pour voter contre Israël relève de la même banalité que la pluie londonienne : c'est dans sa nature. Les délégués se rassemblent, reprennent les mêmes discours que l'année précédente, votent à l'identique, puis se retrouvent pour dîner chez Wolfgang's sur Park Avenue''.

Puis Yaïr Lapid dénonce le dévoiement de l'organisation et son hypocrisie:'' L'idée des Nations Unies procédait initialement du souhait des nations démocratiques de promouvoir les valeurs libérales et les droits fondamentaux. Elle s'enracinait dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. L'article 21 stipule que l'organisation œuvrera au développement de la démocratie mondiale, garantissant partout « des élections périodiques et honnêtes... assurant la libre expression de la volonté populaire ». Il n'y manque que cinq mots cruciaux : « À défaut, l'admission sera refusée ».

Un mélange de culpabilité post-coloniale et de négligence idéologique conduisit l'ONU à accueillir toujours davantage d'États non démocratiques. Selon l'Economist Intelligence Unit, sur les 193 membres de l'Organisation, seuls 25 constituent des « démocraties accomplies », auxquels s'ajoutent 46 « démocraties défaillantes ». Autrement dit, lors de chaque scrutin, pour chaque budget, dans chaque résolution, les régimes non démocratiques détiennent mécaniquement la majorité. Et ils en usent sans le moindre scrupule.

C'est ainsi que l'Iran siégea à la Commission de la condition féminine en 2022, tandis qu'était assassinée Mahsa Amini. La Syrie présida la Conférence sur le désarmement en 2018 tout en gazant sa population. La Corée du Nord dirigea cette même conférence en 2022 en exhibant ses armes nucléaires et bombardant le Japon avec des missiles balistiques. La Chine occupe actuellement un siège au Conseil des droits de l'homme — sans doute en raison de son attachement indéfectible à ces principes'', ironise Lapid.

Puis il en vient à l'obsession anti-israélienne de l'institution: ''Et nous n'avons pas encore évoqué l'acharnement obsessionnel — le terme n'est pas trop fort — de l'ONU contre Israël. Je ne prétends nullement qu'Israël soit exempt de défauts ou d'erreurs. Je désapprouve d'ailleurs la plupart des actions du gouvernement actuel, particulièrement à Gaza (tout en ayant soutenu les frappes en Iran et l'opération contre le Hezbollah au Liban). Néanmoins, le traitement réservé à Israël par l'ONU s'apparente à un délire diplomatique. Israël représente 0,1 % de la population mondiale, mais concentre plus de 60 % des résolutions critiques adoptées par l'ONU cette dernière décennie.

En 2023, année de l'attaque du Hamas du 7 octobre contre Israël, l'Assemblée générale a voté 15 résolutions contre l'État hébreu, contre huit seulement visant l'ensemble des autres pays. Cette disproportion ne constitue pas une anomalie. Durant la dernière décennie, l'Assemblée générale a adopté 187 résolutions contre Israël, contre 86 seulement pour le reste du monde. Durant cette même période, les conflits en Syrie, au Yémen, en Éthiopie et au Myanmar firent infiniment plus de victimes que le conflit israélo-palestinien (y compris la guerre actuelle à Gaza — consultez les statistiques si vous en doutez). Pourtant, les habitudes de vote onusiennes demeurent immuables''.

Et il ajoute: ''Cette aberration n'est pas seulement grotesque — elle coûte cher. Le budget total du système onusien dépasse 70 milliards de dollars, soit davantage que les budgets annuels cumulés du Luxembourg, de l'Estonie, de Malte et de Chypre. Ces fonds proviennent essentiellement des États-Unis et de l'Union européenne, pour disparaître dans un gouffre d'irresponsabilité. Une certitude demeure : ils ne servent pas à promouvoir « la dignité inhérente et les droits égaux et inaliénables de tous les membres de la famille humaine, fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde », comme le proclame la Charte onusienne''.

Yaïr Lapid conclut en appelant à une refonte totale de l'ONU: ''Il nous faut une ONU démocratique. Je propose de la baptiser DAWN — Alliance démocratique des nations mondiales — quoi qu'une appellation moins lyrique puisse convenir. Nul besoin de réinventer ses objectifs, mais simplement de clarifier les conditions d'adhésion : engagement démocratique ; volonté d'affronter les dirigeants autoritaires qui bafouent nos valeurs sacrées ; concentration sur les menaces majeures de notre époque — terrorisme, fanatisme religieux, désinformation, prolifération nucléaire entre des mains irresponsables, et détournement des mécanismes démocratiques par leurs contempteurs.

Cette organisation devra aussi privilégier une authentique coopération économique entre États respectueux de la propriété intellectuelle, des droits humains, de la liberté d'expression et d'élections équitables — incitant d'autres nations à s'engager sur la voie démocratique. Notre message doit résonner clairement : qui veut bénéficier des ressources, du pouvoir et des capacités des démocraties doit en accepter les règles. La démocratie n'est pas un club fermé, mais un contrat contraignant. Ceux qui s'y dérobent ne doivent plus pouvoir abuser de ses privilèges''.

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