Vie politique

Qu’est-ce que la ”loi des Rabbins” qui fait trembler la coalition?

4 minutes
19 juin 2024

ParIsraJ

Qu’est-ce que la ”loi des Rabbins” qui fait trembler la coalition?
Photo by Yonatan Sindel/Flash90

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Depuis que Benny Gantz et son parti ont quitté le gouvernement, une loi laissée de côté depuis le début de la guerre est revenue sur le devant de la scène. Cette loi dite ''loi des Rabbins'', sur laquelle le Ma'hané Hamamla'hti de Benny Gantz  et le parti Yamin Mamla'hti de Guidon Saar avaient posé leur veto, fait aujourd'hui trembler la coalition.

Plusieurs députés du Likoud, dont Moshé Saada, Tally Gottlieb ou Dan Illouz, ont annoncé qu'ils s'y opposeraient. Le parti Otsma Yehoudit de Ben Gvir aussi.

Que contient cette loi?

Cette loi a été initiée par le député Simha Rotman (Hatsionout Hadatit) et le député Erez Meloul (Shass). Elle concerne la nomination des rabbins de ville et de quartiers.

Au coeur de cette proposition se trouve le renforcement du statut du ministre des Cultes et du conseil du Grand Rabbinat d'Israël dans le choix des rabbins de ville. Ce choix appartient aujourd'hui aux prérogatives des collectivités locales qui sont les premières concernées par l'identité et les qualités de la personne qui officiera en tant qu'autorité religieuse suprême dans leurs localités.

La loi prévoit de renforcer le poids du ministère des Cultes dans ces nominations et de restaurer, par ailleurs, le statut de rabbin de quartier qui n'existait plus depuis plusieurs années. Là aussi, le ministère des Cultes aurait une grande influence sur ces nominations.

En d'autres termes, la loi permettra de créer un système de nomination de dizaines voire de centaines de rabbins dans tout le pays qui ne confère quasiment aucune influence aux habitants qui seront les premiers concernés par ces nominations.

En outre, si depuis plusieurs années, la loi prévoit que les rabbins de ville sont nommés pour 10 ans, la nouvelle loi entend restaurer la situation qui prévalait et qui permettait à ces rabbins d'occuper leur poste jusqu'à leur retraite.

La loi diminue également le nombre de femmes représentées dans les corps qui désignent ces rabbins et annule définitivement la loi sur la cacherout portée par Matan Kahana lorsqu'il était ministre des Cultes sous le gouvernement Bennett Lapid et rend le monopole de la cacherout aux rabbins locaux dans leurs villes.

 

Pour les défenseurs de cette loi, il s'agit de débloquer les nominations de rabbins gelées depuis plusieurs années. Pour ses détracteurs, c'est une loi qui servira à créer un système de ''jobs'' et aggravera la déconnexion entre le public et l'institution du rabbinat.

Des secousses au sein de la coalition


Depuis que cette loi est revenue à l'ordre du jour, la coalition est traversée par des courants contraires qui tendent à la fragiliser. Ces tensions se sont accentuées à l'approche du débat qui devait se tenir aujourd'hui autour de ce projet de loi au sein de la commission des Lois.
Ainsi, hier (mardi), les députés Moshé Saada et Tally Gottlieb, opposés à cette loi, ont été exclus de la commission des Lois afin d'y être remplacés par des parlementaires du Likoud en faveur de la loi.

Le ministre Ben Gvir a attaqué frontalement le parti Shass et son chef Arié Derhy en l'accusant d'avoir conclu un deal avec Mansour Abbas et Ra'am afin de pallier l'absence de majorité pour adopter ce projet de loi. Shass a démenti dans la foulée.

Néanmoins, cette accusation n'est pas née de nulle part. Le journaliste Amit Segal a révélé un dialogue entre Binyamin Netanyahou et Arié Derhy qui montre qu'une entente en coulisses avec Ra'am a bien été envisagée:

Derhy: Nous n'avons pas le droit de nous reposer sur la liste arabe ou sur Ra'am. Nous avons 64 députés

Netanyahou: Mais je ne peux pas apporter les 64. Il y a des frondeurs au Likoud et Ben Gvir

Derhy: Alors, il faut que vous compreniez ce que cela signifie. Cela fait des années que nous nous sacrifions pour ce gouvernement, qu'est-ce que vous voulez que je dise au public et aux rabbins? Cela vous parait normal que je leur dise que le Premier ministre a perdu le contrôle?

Netanyahou: Et donc?

Derhy: Décidez ce que vous voulez, vous êtes le Premier ministre. Si vous pensez que nous allons être fâchés, nous ne sommes pas comme ça. Mais c'est vraiment triste.

 

Suite à ces tensions, ce matin (mercredi), le Premier ministre a annoncé que le projet de loi ne serait pas discuté en commission des Lois comme prévu. Affaire à suivre donc.