Navalny avait écrit à Sharansky après avoir lu son ouvrage sur ses années de lutte contre le régime communiste.
''Votre livre confère de l'espoir'', écrit Navalny, ''il existe des ressemblances entre l'URSS et la Russie de Poutine''.
La correspondance entre les deux hommes est pleine d'humour mais aussi parsemées de phrases du Tana'h. Les lettres ont été sorties clandestinement de prison par les avocats de Navalny. Le bureau de Sharansky a confirmé que la publication est authentique. Sharansky lui-même a déclaré à Israël Hayom après la révélation de l'échange de lettres qu'''Alexeï Navalny était dangereux pour le dictateur russe pour deux raisons : il a fait plus que quiconque pour exposer l'essence de la dictature russe aux yeux de centaines de millions de personnes et il a défié le système. Navalny a prouvé qu'il est possible de rester une personne libre jusqu'à son dernier souffle en prison."

Dans la première lettre, datée du 30 mars de l'année dernière, Navalny écrit qu'il allait probablement être transféré dans le centre où Sharansky avait été détenu. "Il doit déjà y avoir une pancarte indiquant 'Ici était assis Sharansky'", écrit l'opposant russe avec son humour caractéristique au début de sa lettre.
"Je m'excuse pour l'intrusion et pour la lettre d'un inconnu", écrit Navalny. "Cependant, je crois qu'une telle chose est autorisée dans une relation auteur-lecteur. Je vous écris en tant que lecteur. J'ai lu "Fear no Evil" dans ma cellule, mais maintenant je suis dans une cellule disciplinaire isolée (il y aura bientôt 128 jours au total). J'ai lu l'endroit où vous écrivez "nous avons effectué une série d'isolements de 15 jours, puis, en tant que contrevenant aux instructions, nous avons de nouveau passé six mois en cellule". J'ai ri du fait que rien n'a changé dans ce système, ni son essence ni sa méthode de travail'', écrit encore Navalny.
"Ce livre m'aide beaucoup. Oui, je suis en isolement punitif, mais quand on lit vos 400 jours dans une cellule d'isolement avec une alimentation limitée, on réalise qu'il y a des gens qui ont payé un prix plus élevé que soi pour leurs convictions. Je vois la carte postale qu'Avital ( Sharansky) vous a envoyé : tous les mots y sont censurés. Je ne suis pas le premier à endurer cela, mais j'aimerais beaucoup être le dernier, ou du moins l'un des derniers. Votre livre donne l'espoir que la similitude entre les systèmes de l'URSS et de la Russie de Poutine, leur proximité idéologique, l'hypocrisie comme base du régime, et leur continuité entraine également leur effondrement''.
La lettre de Sharansky est également très touchante. "Cher et très respecté Alexeï, votre lettre m'a profondément touché. La seule pensée d'une lettre venant du même centre de détention pénale où j'ai été enfermé pendant 128 jours m'émeut. Comme si j'étais un vieil homme recevant une lettre de l'université où il a passé sa jeunesse. Je vous écris non seulement parce que vous êtes un lecteur, mais aussi en tant qu'admirateur. Et en tant qu'admirateur, vous n'êtes pas juste un ''dissident'', vous êtes un ''dissident with a style'' (avec un style). L'horreur de votre empoisonnement se mêle à l'étonnement après vos enquêtes. J'ai été choqué par une question d'un journaliste européen le lendemain de votre retour en Russie. "Pourquoi est-il revenu ? Nous avons tous compris qu'il serait immédiatement arrêté à l'aéroport - et lui n'a pas compris ?" Je lui en ai voulu : "Vous ne comprenez pas. S'il s'inquiétait pour sa survie, alors oui, vous auriez raison, mais il s'inquiète pour son peuple comme s'il disait 'Je n'ai pas peur et vous ne devriez pas avoir peur.' Alexeï, restez un homme libre, ainsi vous influencerez des millions d'âmes dans le monde entier. "
La lettre de Sharansky a été écrite juste avant Pessah l'année dernière, il la conclut par: ''Je vous souhaite à vous et à toute la Russie une sortie de votre Egypte''.