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Les aventures extraordinaires de Moïse Lévy – Episode 17. Par Eden Levi Campana

10 minutes
8 septembre 2023

ParIsraJ

Les aventures extraordinaires de Moïse Lévy – Episode 17. Par Eden Levi Campana
Crédit dessin: MICHEL POLITZER. Réalisé exclusivement pour LPH INFO

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Résumé épisode 16 :

A l’hôtel David Kempinski, Moïse se découvre soudain une âme d’espion. Il vole deux valises qui appartiennent à des clientes, monte dans sa chambre au 34e étage et se travestit en femme. Il redescend, traverse le hall sans que personne ne le reconnaisse et sort de l’hôtel. Dans la rue Moïse voit « Petit Bonnet Bond » et deux autres hommes dans un véhicule. Ils ne l’ont pas vu sortir de l’hôtel, accoutré de la sorte. Un des hommes rentre dans l’hôtel et « Petit Bonnet Bond » se rend à pied jusqu’au cimetière de Trumpeldor, Moïse le suit.

 

L’opération « Docteur du désert »

 

 

Tel-Aviv, cimetière de Trumpeldor

 

Un employé du cimetière avance à pas comptés dans l’allée principale. Il a des yeux globuleux, des jambes courtes et un ventre proéminent. Sa démarche est celle d’un pingouin sur la banquise et il semble aussi vintage que le récipient qu’il tient par son anse, un seau métallique à moitié rouillé. Il voit une grosse dame avec un chapeau rose, couchée derrière des tombes, à deux pas de la pierre tombale de Meir Dizengoff, ce qui provoque chez lui une énorme colère. Quel manque de respect. Il fronce un sourcil, puis l’autre, puis les deux ensembles. Une gymnastique qui visiblement l’épuise.

 

- Abu Reiha ! s’exclame le pingouin qui ressemble à présent à un Lokous tout juste arraché de l’eau par un pêcheur sanguinaire. Les yeux rivés sur la dame au chapeau rose, curieux et maladroit, l’homme-mérou ne remarque pas une dalle légèrement plus haute que les autres sur le sol, pas avant que son pied ne la heurte, pas avant de se transformer en derviche disgracieux, pas avant que son seau ne fasse une embardée et ne s’écrase à quelques mètres derrière Moïse, répandant une épaisse couche de peinture noire sur le sol.

 

A ce moment précis, Moïse s’est jugé perdu, puisqu’il était surpris, sa retraite coupée et tous ses chemins pris. Il s’apprête à saisir dans sa gueule brûlante, de l’espion le plus hardi la gorge pantelante. Des années auparavant, Il avait eu une séance de Krav Maga avec David, il devrait pouvoir s’en sortir.

 

Moïse-Paoli se retourne brusquement. Il est soulagé de ne trouver aucun danger, juste un pingouin-mérou barbotant dans la peinture noire, dans le cimetière historique de la plus blanche des villes d’Israël.

- Oy Vaï ! dit Moïse en se redressant.

- Excusez-moi madame, je ne voulais pas vous effrayer.

- M’effrayer moi ? Moïse 007, dit doucement notre apprenti-espion.

 

Moïse remonte sa jupe avec l’élégance d’un garçon-boucher, ajuste son soutien-gorge bourré de papier toilette, plaque son chapeau rose sur le haut de son crâne, dissimule sa barbe sous l’écharpe colorée, puis passe dignement devant le pingouin- mérou, sans un regard de compassion. Une journée ordinaire, en fait.

 

« Petit-Bonnet Bond » a également été surpris par la chute du seau vintage. Il s’approche de l’allée principale et voit l’employé du cimetière qui glisse dans sa peinture et cette drôle de citoyenne qui s’éloigne, en laissant derrière elle des traces de pas dans la peinture noire, puis des traces de peinture noire sur le sol. Quels pieds, démesurément grands ! « Petit-Bonnet Bond », fétichiste de son état, en tomberait presque amoureux.

 

A deux pas de l’Ambassade du Kazakhstan, Moïse aperçoit une voiture de police à l’arrêt au feu-rouge. Il change de trottoir. Son accoutrement pourrait lui causer des ennuis. En passant devant l’Hôtel David Kempinski, il constate que la Tesla noire a disparu. Moïse la retrouve une heure trente plus tard, au pied de l’immeuble de David. Les deux hommes sont là, impassibles, guettant l’improbable passage de Moïse.

 

« Leur présence risque de compliquer les choses » se dit Moïse, « à moins que… hum, je pourrais exploiter la situation. Ce sont certainement ceux qui ont kidnappé David. »

 

Moïse pénètre dans l’appartement de David. Il n’échappe pas à la ruade du chat, ni au léchage intégral de sa barbe. Décidément, c’est l’amour fou.

- Je dois te rappeler un ancêtre. Il avait le poil blanc comme moi ? Demande Moïse sur un ton candide, en reposant le chat par terre.

Le miaulement en réponse fait écho à une sonnerie. Moïse s’approche de l’origine du son, qui ressemble à un shofar. On se croirait à Roch Hachana.

Il appuie comme un désespéré sur plusieurs boutons, tourne une molette dans tous les sens.

On a beau être un espion de classe internationale, depuis une heure, et être toujours aussi hermétique à la technique et aux nouvelles technologies.

 

Il finit par allumer l’interphone. Dov apparaît au centre de l’écran. Moïse lui indique l’étage, puis lui ouvre la porte, ou plutôt pense lui avoir ouvert la porte. L’opération prend en réalité plus de cinq minutes. Dov finit par profiter du passage d’un voisin.

Deux minutes plus tard, il est assis dans le salon de David et regarde autour de lui.

- Sababa, c’est beau chez toi.

- Ce n’est pas chez moi, répond Moïse.

- Pourquoi m’avoir fait venir ? D’ailleurs tu as dit que tu me payerais.

- Oui je voulais te demander un service mais il y a un petit changement de programme. Mais ça ne change rien pour toi.

Dov est attentif.

 

- Behaïme ! Dit Dov en tendant la main vers le chat. Le félin vient se caresser contre son index.

- Il y a une voiture en bas de l’immeuble, je voudrais que tu la surveilles.

- Et après ? Je cours derrière en aboyant ?

- Quand elle part tu me téléphones.

- Tu dois me payer tout de suite. Je suis parti du marché et il me faut de l’argent.

- Ce soir, lui répond Moïse.

- Non, ce soir c’est trop tard.

- Je ne peux pas sortir pour te chercher de l’argent, …

- A cause de ces hommes ?

- Ken.

- Désolé, s’excuse Dov. Je dois vite retourner au marché pour gagner de l’argent.

- Pourquoi ? Pourquoi cette urgence ?

- Je ne t’ai pas tout dit. Avec ma mère nous sommes expulsés aujourd’hui, il faut payer le loyer d’avance, sinon on va dormir sur la plage.

 

Moïse réfléchit un instant, puis demande à Dov : - Tu cherches un endroit pour dormir ce soir ?

- Évidemment. J’ai la chambre mais pas l’argent.

- Si tu avais un logement payé pendant quelques jours ?

- Ce serait incroyable.

- Tu veux que je m’en occupe ?

Dov fait oui avec la tête.

- Combien de temps ?

- Le temps de trouver une autre solution.

- Une semaine ?

Dov fait oui avec la tête.

Moïse tend son téléphone à Dov et lui demande de composer un numéro.

- Oui, ne quittez pas, dit dov avant de tendre le téléphone à Moïse.

- Monsieur Paoli. Je voudrais prolonger mon séjour d’une semaine. Oui pas de soucis. D’accord, il vous reste uniquement la Suite ? Quel tarif ? Ah quand même. Bon c’est d’accord. Pour payer ?

Moïse écoute la réponse du réceptionniste.

- Oui prenez sur la carte que je vous ai donné, pas de soucis.

- Merci, au revoir.

 

Moïse se tourne vers Dov.

- Tu vas travailler pour moi, en échange du logement. Tu iras dormir à l’hôtel avec ta mère. La chambre est payée.

- Tod raba Moïse, tu es un grand homme, vraiment.

- C’est moi qui te remercie, jeune ami.

- Et l’homme qui te suivait au shuk ?

- Tu l’as vu ? Le bonnet ?

- Ken, dit Dov.

- Ils sont ensemble. Si tu le vois tu dois me prévenir.

- D’accord. J’y vais tout de suite ?

- S’il te plaît, dit Moïse en posant sa main sur l’épaule de Dov. Je vais te donner les informations dont tu as besoin.

 

Moïse va dans la cuisine, revient avec le chat sur l’épaule, pose sur la table basse un morceau de papier et un stylo et écrit, Dov l’observe.

- Oy, dit Moïse. Voici la plaque d’immatriculation de la voiture, une Tesla noire. Et là tu as le numéro de chambre, le code et le nom de la personne qui a fait la réservation.

- Paoli !

- Ken. Paoli Pasquale, c’est toi. Tu entres et tu montes direct au 34eme fait en sorte que personne ne te remarque. Il faut être discret.

- Tu peux compter sur moi, Discret c’est mon deuxième prénom.

 

- Merci jeune ami, dit Moïse en accompagnant Dov jusqu’à la porte d’entrée. En passant près de la bibliothèque, le chat qui est toujours installé sur son épaule fait un saut carpé en direction du meuble et se réceptionne avec douceur. Avant de fermer la porte derrière lui, Moïse donne un dernier conseil à Dov :

- Surtout sois prudent. Tu ne prends aucun risque. Je ne sais pas si ces hommes sont dangereux. Pas de plaisanteries.

- T’inquiète, Prudent c’est mon troisième prénom.

 

Au moment où Moïse revient vers le salon un téléphone sonne, celui qui était dans le bureau de David. Moïse essaie de répondre, en vain. Il voit quand même le texte qui s’affiche sur l’écran : « Y. Diamantkring », un nom qui lui est familier.

 

 

Palais de l’Elysée, Paris - France

 

Une femme d’une quarantaine d’année, vêtue d’un tailleur gris-souris traverse la cour D’honneur du Palais présidentiel et se retrouve dans la rue du Faubourg-Saint-Honoré, au numéro 55. Elle jette un coup d’œil à son téléphone portable, puis le range dans la poche. Elle fait quelques pas, sort le téléphone à nouveau et vérifie le dernier appel qu’elle a passé. Le numéro de David est affiché, ainsi que son prénom. Elle range une nouvelle fois le téléphone. Elle semble pensive.

Elle remonte la rue, jusqu’à l’Avenue de Matignon, puis emprunte la rue de Rabelais. Elle fait un signe de tête aux deux policiers qui sont devant l’Ambassade d’Israël à Paris. Ils ne lui demandent pas ses papiers, pas plus que leurs collègues à l’intérieur.

 

Elle contourne la guérite, pénètre l’enceinte principale, jette un coup d’oeil rapide à la réplique de la mosaïque de la synagogue « Shalom Al Yisrael », passe devant l’accueil, dévale la vingtaine de marches d’un escalier de service et se retrouve dans une salle au sous-sol. Huit hommes entre 20 et 50 ans discutent entre eux, à voix basse. Tous les regards se tournent vers la nouvelle arrivante.

- Salut chef, dit un des trois chauves, le plus baraqué.

Yaël leur annonce la mauvaise nouvelle : - Nous sommes seuls sur ce coup, « le

Château » ne veut rien entendre.

- Tu sembles surprise, dit Yonatan, l’homme le plus âgé. Les Français ne vont pas nous aider à déstabiliser une opération qu’ils ont eux-mêmes mis en place… et plus si affinité.

- La voie diplomatique n’est pas totalement fermée, mais nous n’avons plus de temps à perdre. Nous avons le feu vert du « Bureau », c’est parti pour « l’opération Docteur du désert ».

A ce moment-là, un homme au pas lourd entre dans la pièce. Il fait près de deux mètres, des mains larges comme des hélices, des épaules de boxeur poids lourd et le visage allongé des culturistes qui ont abusé des stéroïdes et des hormones de croissance. L’homme porte une chemise blanche, un costume bleu et une cravate assortie. Il baisse les yeux, fautif.

Yaël enjambe précipitamment une chaise. Se jette sur le géant, l’attrape par la cravate et tire de toutes ses forces. Etranglé, l’homme se plie en deux. Yaël s’approche de son oreille et lui murmure : - Nous sommes le Mossad. Tu sais ce que ça signifie ? Nous n’agissons pas comme ça. Alors la prochaine fois que tu me fais un coup pareil, je te mets une balle dans la tête.

Elle donne des coups avec la paume de sa main sur le haut du crâne de l’homme, toujours courbé.

 

- Tu as compris ce que je te dis ou tu as grillé ton dernier neurone au stand de tir ?

- Compris Madame, désolé, je pensais…

- Tu quoi ? Tu veux te faire un claquage du cerveau ? Dit Yaël le plus sérieusement du monde.

- C’est grave ? demande l’homme les yeux écarquillés.

- Chez toi, non. Il n’y a plus rien à griller depuis longtemps, va t'asseoir.

L’homme s’exécute.

Yaël attend qu’il soit assis et silencieux et lance : - Je vais vous expliquer nos options et le plan que « le Bureau » vient de valider.

 

 

Rendez-vous la semaine prochaine pour le prochain épisode des « AVENTURES EXTRAORDINAIRES DE MOÏSE LEVY».

 

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