Vie politique

 »On appelait les chemises, les nains; les cigares, les feuilles et le champagne; les roses »: fin de la première journée d’audience d’Arnon Milchan

6 minutes
25 juin 2023

ParIsraJ

 »On appelait les chemises, les nains; les cigares, les feuilles et le champagne; les roses »: fin de la première journée d’audience d’Arnon Milchan
Photo by Oren Ben Hakoon/POOL

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L'homme d'affaires Arnon Milchan était appelé à la barre, en qualité de témoin cité par le Parquet, aujourd'hui dans le procès Netanyahou sur le dossier 1000, autrement appelé dossier des ''cadeaux''.

Netanyahou est accusé de fraude et d'abus de confiance dans ce dossier. L'accusation repose sur le fait que Netanyahou aurait reçu pour des millions de shekels de cadeaux de la part d'Arnon Milchan, avec lequel il est ami, et le Premier ministre lui aurait acccordé des facilités concernant ses affaires en Israël.

 

Milchan, 78 ans, témoignait depuis Londres, il n'a pas pu se déplacer en Israël et c'est la procureure Liat Ben Ari et l'avocat de Netanyahou, Amit Haddad, qui se sont rendus en Angleterre pour l'interroger.
Sarah Netanyahou était présente dans la salle à Londres, son époux, dans la salle du tribunal à Jérusalem pour suivre le témoignage sur écran avec les trois juges.

Photo by Oren Ben Hakoon/POOL


Lorsque Milchan a aperçu Netanyahou, il lui a lancé: ''Salut Bibi''. Le Premier ministre lui a répondu d'un salut de la main.

 

Aujourd'hui, le témoin Milchan était interrogé par l'Accusation. Interrogé par Liat Ben Ari, Milchan a décrit les affaires et les biens qu'il possédait en Israël. Il a expliqué que sur place ce sont Hadas Klein, Yonatan Hasson et Sarah Shohat qui gèrent ses affaires. Ces derniers ont déjà témoigné devant la Cour à Jérusalem. Milchan a dit devant la Cour que Netanyahou voulait qu'Hadas Klein soit renvoyée parce qu'elle ''en savait trop'' mais l'homme d'affaires ne l'a pas écouté.

Il a raconté que la première fois qu'il a rencontré le couple Netanyahou, était aux Etats-Unis. ''Nous nous sommes connus en 1996, il était venu à New York en tant que Premier ministre avec son épouse. Je les ai invités à la projection d'un film''. Il poursuit son récit en précisant qu'à un moment donné Sarah Netanyahou lui a demandé d'acheter une peluche de Bugs Bunny pour son fils Yaïr qui avait tout juste cinq ans à l'époque. Milchan a acheté la peluche, puis il a dîné avec le couple Netanyahou et le Premier ministre lui a demandé s'il pouvait aider par rapport au budget américain. ''Je ne suis pas parlementaire mais j'ai fait passer quelques messages''. Puis le lien est rompu entre les deux hommes et Milchan reconnait qu'il s'est senti ''vexé'' par le fait que Netanyahou ne lui répondait pas au téléphone.

Photo by Flash90


Finalement, Milchan et Netanyahou sont devenus des amis proches, l'homme d'affaires a reconnu qu'il le considérait quasiment comme un frère.

Lors de son témoignage aujourd'hui, il a montré une photo où il se trouve avec Netanyahou et Lapid et a lancé à Sarah Netanyahou: ''C'était l'époque où ils s'entendaient''.

 

Liat Ben Ari a demandé à Milchan pourquoi il était si important pour lui d'être en bons termes avec le Premier ministre Netanyahou. Il a répondu: ''Nous étions vraiment amis. La seconde raison est que j'étais proche de précédents premiers ministres, comme Shimon Peres et Ariel Sharon, dans le cadre de mes efforts en coulisses pour parvenir à une paix avec les Palestiniens. Je n'en dirai pas plus''.

Ben Ari l'interroge ensuite sur les cadeaux qu'il faisait au couple Netanyahou et lui demande quel type de présents il leur offrait. ''Je ne m'en souviens plus'', répond-il.

Ben Ari lui rafraichit la mémoire: ''Est-ce que vous vous souvenez des cigares que vous avez offerts à l'accusé?''.

Milchan: ''Oui je m'en souviens''.

Ben Ari: ''Et les bouteilles de champagne? En avez-vous donné au couple Netanyahou?''

Milchan: ''Oui''

Ben Ari: ''Avez-vous offert au couple Netanyahou des bijoux ou un bijou?''

Milchan: ''Je pense que oui''

 

Ben Ari demande ensuite à Milchan, si en dehors des cigares et des bouteilles de champagne, il a aussi acheté des chemises et des manteaux pour le couple Netanyahou. Milchan répond par l'affirmative.

Ben Ari lui rappelle que lors de son interrogatoire par les enquêteurs, il a dit qu'il trouvait ''écoeurant'' que Netanyahou et son épouse lui demandent de leur acheter des manteaux. Il a confirmé.

Milchan a raconté qu'il a pris l'initiative d'acheter la première chemise à Netanyahou, ''parce que j'avais fait remarquer à Bibi que les chemises qu'il portait n'étaient pas très belles''. Puis c'est Netanyahou lui-même qui lui a demandé de lui en acheter d'autres.

Il a reconnu que le processus avait été le même pour les cigares et les champagnes: ''J'ai pris l'initiative puis les demandes venaient d'eux. Je donnais carte blanche à Hadas Klein pendant tout le temps où je n'étais pas en Israël. Je lui ai dit que ce que le Premier ministre voulait, il devait le recevoir. Pas parce que c'est un ami mais parce qu'en temps que citoyen je ne voulais pas que le Premier ministre ait besoin de se soucier de cela. Puis c'est devenu une routine''. Les quantités demandées allaient en augmentant.

Milchan a confirmé que Bibi et Sarah lui faisaient la demande et qu'il leur fournissait: ''Nous avions des codes. Les chemises étaient des ''nains'', les cigares, des ''feuilles'' et le champagne, des ''roses''''.

L'homme d'affaires a expliqué que Netanyahou lui avait dit qu'il avait consulté le conseiller juridique du gouvernement et qu'il avait le droit de recevoir des cadeaux de la part d'amis.

 

Pendant l'audience, Milchan s'est montré taquin au moment où Liat Ben Ari a interrompu son interrogatoire pour dire: ''Je demande que soit noté dans le protocole que Mme Netanyahou est en contact visuel avec le témoin. Je demande qu'il soit précisé qu'elle n'a pas le droit de faire des grimaces ou toute expression qui pourrait influencer le témoin''.

Me Haddad a alors répliqué: ''A moins que des yeux aient poussé dans le dos de Ben Ari, je ne sais pas comment elle peut prétendre une telle chose''.

A cet instant, Milchan a lancé: ''Je vais regarder le plafond, d'accord? C'est une comédie, ma parole. Je vais en faire une série''.

 

Milchan a ensuite raconté qu'il avait bien acheté un bijou à Sarah mais n'a pas pu préciser si c'est l'épouse du Premier ministre qui l'avait choisi. L'homme d'affaires a souligné qu'il a d'abord demandé à Netanyahou s'il n'y avait pas de problème à ce qu'il lui offre un bijou par rapport à la loi. Le Premier ministre lui a répondu qu'il pouvait recevoir des cadeaux de la part d'amis, sans limite, et ce d'après le conseiller juridique du gouvernement. ''Je ne voulais pas qu'il ait des ennuis'', raconte Milchan.

 

L'audience a été levée vers 17h. Elle reprendra demain.

L'enjeu pour le Parquet sera de montrer si le fait d'avoir obtenu tant de cadeaux de la part d'Arnon Milchan a influencé Netanyahou pour prendre des décisions au niveau de l'Etat dans l'intérêt personnel de son ami homme d'affaires.