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Qui a tué Yasser Arafat?

4 minutes
12 novembre 2022

ParIsraJ

Qui a tué Yasser Arafat?
Photo by Abed Rahim Khatib/Flash90

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Hier, 11 novembre, les Palestiniens ont commémoré les 18 ans de la mort de Yasser Arafat.

En octobre 2004, Arafat se plaint de douleurs à l’estomac et de vomissements. Malgré une première intervention chirurgicale dans son quartier général de la Moukata à Ramallah, sa santé continue de se dégrader. Le 29 octobre, gravement malade, Yasser Arafat quitte Ramallah pour rejoindre la Jordanie, d’où il se rend en France, à bord d’un avion médicalisé. Il décède à Paris le 11 novembre 2004.

Depuis le début, les Palestiniens n'ont jamais cru à une mort naturelle. Des soupçons d'empoisonnement entourent le décès du Raïs palestinien et une commission d'enquête palestinienne a été diligentée en 2010. Les Palestiniens soutiennent que leur chef a été empoisonné par une personne qui collaborait avec Israël: ''Personne, même le plus grand opposant d'Arafat, n'aurait osé faire quoi que ce soit sans coordination avec Israël'', estime-t-on au sein de l'Autorité palestinienne.

Les protocoles de cette commission sont restés secrets mais ces dernières semaines, des éléments ont fuité sur les réseaux sociaux.

Ils mettent à jour les relations très tendues et conflictuelles entre Yasser Arafat et son successeur Mahmoud Abbas. Les deux hommes ne s'appréciaient pas du tout et Arafat soupçonnait Abbas de fomenter un complot contre lui avec le soutien des Etats-Unis et d'Israël.

D'après les témoignages des responsables palestiniens devant la commission, Arafat voyait rouge à chaque fois que le nom d'Abou Mazen ou d'un de ses hommes était prononcé devant lui. Abou Mazen, quant à lui, avait l'habitude de traiter Arafat de ''sénile''. Un des témoins déclare: ''Abou Mazen n'aimait pas Arafat. Il avait des ambitions au sein du Fatah et de l'Autorité palestinienne''.

Des proches du pouvoir à l'époque de l'hospitalisation d'Arafat rappellent qu'Abou Mazen a toujours refusé tout contact avec Arafat pendant cette période et ne lui a rendu aucune visite.

Les protocoles de la commission d'enquête palestinienne font état de témoignages qui soutiennent la thèse selon laquelle Abou Mazen et ses hommes seraient impliqués dans ''l'élimination'' d'Arafat. ''Ils avaient intérêt à ce qu'Arafat parte. Ils ont construit une alliance solide contre nous et Arafat le savait'', déclare l'un des proches du Raïs.

Les témoignages évoquent aussi la période où la Moukata était assiégée par Israël. Arafat qui était prisonnier dans son palais était devenu parano surtout lorsqu'il constatait que contrairement à lui, Abou Mazen et ses hommes continuaient à circuler librement et ne lui apportaient aucune aide, n'essayant même pas de convaincre Israël de lever le siège.

Si, au départ, c'est Mohamed Dahlan, aspirant à la succession d'Arafat, qui faisait l'objet des soupçons, ils se sont vite portés sur Mahmoud Abbas. Les personnes qui ont témoigné devant la commision d'enquête estiment que: ''il s'agit de rumeurs véhiculées par les adversaires d'Abou Mazen. Dahlan n'est pas capable d'une chose pareille''.

Finalement, les tensions entre Abou Mazen et Arafat ont atteint leur paroxysme lorsque les Américains et les Israéliens ont fait pression sur ce dernier pour qu'il nomme Abbas Premier ministre, selon les témoignages qui ont fuité de la commission d'enquête.

 

Les Palestiniens tentent de savoir d'où viennent les fuites de ces protocoles. Pour beaucoup, elles viennent de Tawfik Tirawi, qui était le ministre des Renseignements palestiniens par le passé et l'un des rivaux d'Abou Mazen. Il y a peu ce dernier a refusé de donner à Tirawi des responsabilités au sein de l'Autorité palestinienne. Tirawi chercherait donc à se venger. Par ailleurs, Tirawi fait partie de ceux qui sont virulemment opposés à la volonté d'Abou Mazen de nommer Hussein A-Sheikh comme son successeur.

L'entourage d'Abou Mazen prétend que tout n'est que mensonge et le Raïs a convoqué une réunion mercredi dernier pour déterminer la façon de réagir à ces fuites.

D'où que viennent les fuites, que ce soient des vérités ou des mensonges, cet épisode qui préoccupe au plus haut lieu au sein de l'Autorité palestinienne, prouve, une fois de plus, que les couteaux sont tirés dans la guerre de succession à Abou Mazen, 87 ans, dont l'autorité est de plus en plus contestée par la rue palestinienne.