Le journaliste lui a demandé s'il était prêt "à payer le prix de la paix" - expression tristement célèbre en Israël - et s'il était d'accord avec la nécessité de mettre fin à "l'occupation" et à la création d'un Etat "palestinien" sur les lignes d'avant 1967 et la solution de tous les problèmes centraux comme Jérusalem et les réfugiés. La réponse de Benny Gantz a été la suivante : "Les Palestiniens veulent et ont droit à une entité dans laquelle ils vivront librement". Il a toutefois refusé de dire que ce serait forcément un "Etat" : "Que ce soit un Etat ou une empire, ils l'appelleront comme ils le veulent. Ils ont le droit de sentir qu'ils sont indépendants et qu'ils aient une capitale et que toutes les questions soient résolues. Nous devons employer un langage nouveau et actualisé sur les moyens de résoudre la question et plus de nous accrocher au discours traditionnel. Nous voulons nous séparer d'eux et obtenir des garanties sécuritaires. Si nous nous mettons d'accord sur les questions sécuritaires, la solution politique viendra facilement...".
Sur la question des frontières, Benny Gantz a pris ses distances du Plan Trump et des positions de Binyamin Netanyahou et s'est dit prêt à de larges concessions, sans avoir d'ailleurs été mandaté pour faire ce genre de déclaration : "Israël a besoin de la vallée du Jourdain dans le cadre de ses besoins sécuritaires mais la superficie de l'extension de souveraineté israélienne ne sera pas forcément de 30% de la Judée-Samarie et pourra être significativement réduite. Nous nous sommes opposés au plan de souveraineté dès le début (...) Nous sommes opposés à la légalisation des avant-postes et nous voulons que l'entité palestinienne dispose d'un espace géographique digne qui leur permettra une vie normale et sans obstacles."
Et concluant avec un thème défensif désuet : "Tout ce que nous voulons c'est la sécurité. Nous avons besoins de points stratégiques pour notre sécurité. On peut parler d'échange de territoires bien que je ne sache pas comment et où mais nous ne reviendrons pas aux frontières de 1967. On peut trouver une solution transitoire et ce qui est primordial est de maintenir le processus vivant".
Le président de la Knesset Yariv Levin (Likoud) a vivement réagi à cette interview : "Jérusalem est le coeur d'Erets Israël et de l'Etat d'Israël. C'est vers elle que les Juifs ont prié durant 2000 ans. Nous avons eu la chance de la réunifier comme capitale éternelle de l'Etat d'Israël. Il n'y a pas deux Jérusalem et personne n'a le droit de mettre en doute nos droits sur la ville. Et personne n'a la droit de renoncer au rêve de tant de générations qui s'est concrétisé..."
Le ministre Elie Cohen (Likoud) a réagi sur le plan politique : "Il est triste de voir que pour grapiller quelques voix, des politiciens sont prêts à vendre Jérusalem, la ville vers laquelle ont prié nos ancêtres durant des siècles..."
Le mouvement "Bit'honistim" formé d'anciens officiers de Tsahal a appelé Benny Gantz a appelé le ministre de la Défense à retirer ses propos ou à démissionner : "Les propos émis par Benny Gantz sont en totale contradiction avec les principes sécuritaires d'Israël et constituent un potentiel de graves atteintes à la sécurité du pays". Les officiers soulignent que les propos sur le "maintien de quelques points stratégiques dans la vallée du Jourdain" ont été particulièrement irresponsables.
Photo Tomer Neuberg / Flash 90